Libéré de toute activité professionnelle, on peut mettre à profit sa retraite pour s’engager à 100 % pour des causes légitimes : celle qui me tenait à cœur était d’accompagner les femmes entrepreneures dans l’accomplissement de leur projet.
Comme cadeau de départ de mon entreprise, j’ai reçu une collection de 5 livres : Les Femmes qui s’engagent, qui pensent, qui écrivent, qui lisent, les femmes artistes… sont dangereuses. Dangereuses ? Peut-être. Mais aussi tellement indispensables pour faire bouger nos sociétés ! J’en suis intimement convaincu.
1. Ce que je croyais avant
Je vais paraphraser Valérie Duez-Ruff, avocate au barreau de Paris : “Je croyais le féminisme la cause de femmes militantes et engagées pour des bouleversements majeurs de la société. Aujourd’hui je sais que j’avais tort. Nous sommes toutes et tous actrices et acteurs de la société et nous pouvons tous la changer, à notre échelle. Il n’y a pas de petite ou de vaine action. Tout micro-changement est une micro-révolution. »
Durant ma vie active de professionnel de la communication, j’ai eu la chance de croiser la route de femmes engagées au sein de la société, en politique, en entreprise, dans un monde toujours très masculin : elles ne lâchaient rien ! Simplement pour montrer et démontrer que leur place n’était pas usurpée et que leurs projets en valaient la peine ! J’ai quasiment toujours travaillé avec une supérieure hiérarchique et quand j’ai quitté un poste associatif ou professionnel, j’ai toujours trouvé une femme pour me remplacer (preuve que le poste n’était pas réservé aux hommes). J’ai pu accompagner les femmes de mes équipes à prendre plus de responsabilités mais je ne pensais pas que c’était des micro-révolutions : pour moi, c’était juste normal.
Alors, quand l’heure de la retraite a sonné, avec mon épouse et mes enfants, nous avons décidé de créer notre Fonds de dotation pour relever ce défi : permettre à celles qui en expriment le besoin de s’accomplir dans leur projet. Même si l’ampleur du travail est incommensurable, contribuer chaque jour à des micro-révolutions, quel plaisir !
Et quand ces livres m’ont été offerts, je me suis trouvé devant une quantité de portraits de femmes, pionnières, indépendantes, agitatrices, émancipées voire révolutionnaires, insoumises, porteuses d’un message qui est devenu ma conviction : la femme est bien au cœur des responsabilités de l’humanité contemporaine.
2. Ce que j'ai découvert
Ces livres témoignent d’une réalité : l’engagement au féminin n’est affaire ni d’époque, ni de nationalité, ni de métier… Chez toutes ces femmes, des plus connues comme Marguerite Duras, Joséphine Baker, Françoise Sagan, Agnès Varda, Simone Veil ou Simone de Beauvoir, aux moins connues comme la fondatrice du mouvement des suffragettes britanniques, Emmeline Pankhurst, la pacifiste autrichienne Bertha Von Suttner, la biologiste américaine Rachel Carson, pionnière de l’écologie, l’écrivaine indienne Taslima Nasreen, ou encore la militante pakistanaise pour l’éducation des filles Malala Yousafzai, on trouve le rejet d’une condition qui paraît fondamentalement injuste. Si ces femmes ont vu leur portrait brossé dans ces livres, c’est qu’elles partagent une forme de courage pour oser braver les contraintes et les interdits : qu’elles soient actrices, intellectuelles, écrivaines, scientifiques, philosophes, politiciennes, peintres, journalistes… elles démontrent qu’elles lisent, pensent, agissent, vivent pleinement leur siècle pour interpeller, revendiquer, surprendre, inciter à l’action avec une réelle envie de changer le monde, prendre sa vie en main et la diriger, être indépendante, s’émanciper !
- Les femmes qui PENSENT sont dangereuses
Livre militant, comme le dit le co-auteur Stefan Bollmann, car ces « femmes représentent des choix de vie marqués par un désir de changer le monde et de surmonter les obstacles rencontrés ». Femmes de courage dans la science, militantes pour les droits des femmes ou témoins rebelles de leur époque, elles ne font pas que penser : elles posent sans cesse la question du “comment doit-on vivre et quel but atteindre dans sa vie en tant que femme” ?
- Les femmes qui LISENT sont dangereuses
En lisant, elles s’approprient des connaissances auxquelles la société ne les avait pas prédestinées. L’histoire de la lecture féminine se reflète magnifiquement à travers une soixantaine de tableaux et photos qui témoignent que les femmes pénètrent l’espace de la pensée, de l’imagination, du savoir. Pour, selon l’auteur Stefan Bollmann, « conclure avec le livre une alliance : livre comme conquête de la liberté, livre comme apprentissage de la liberté ».
- Les femmes qui ÉCRIVENT vivent dangereusement
Car comme le souligne Laure Adler, directrice de cette collection et co-autrice des ouvrages, « une femme qui écrit est la créatrice d’un univers, une semeuse de désordre, une personne qui se met en risque et qui ignore le danger, tant sa tâche la requiert, une personne qui invente la langue, sa langue, notre langue ».
Parmi la cinquantaine de portraits d’auteures, du Moyen Âge jusqu’à l’époque contemporaine, celui de l’Anglaise Mary Wollstonecraft (1759-1797), avocate des droits de la femme, m’a particulièrement touché : pionnière de l’émancipation des femmes contestant les conventions sociales et les stéréotypes, elle a su, avec près d’un siècle d’avance, proclamer et prouver par son expérience personnelle que les femmes devaient prendre en charge leur destin pour sortir de leur état de sujétion.
Quant à l’Américaine Harriet Beecher-Stowe, auteure de La Case de l’oncle Tom, elle publia en 1852 un ouvrage qui fut un audacieux réquisitoire contre l’esclavage et qui aurait fait dire à Abraham Lincoln : « voici donc la petite dame qui a mené cette grande guerre ».
- Les femmes qui S’ENGAGENT sont dangereuses
Comme Catherine Valenti l’exprime, « l’engagement suppose toujours une implication active dans une époque donnée, qu’il s’agisse de la simple promesse de remplir une obligation ou des prises de position. Mais l’engagement a longtemps été interdit aux femmes. Pendant des siècles, systématiquement moins bien éduquées que les hommes, renvoyées à leur immuable fonction maternelle, elles n’ont pas pu acquérir les outils conceptuels indispensables à la réflexion et partant à l’engagement ».
Or ces outils sont indispensables pour poursuivre un objectif unique : celui de l’avènement d’une société égalitaire.
- Les femmes ARTISTES sont dangereuses
S’il est un domaine où l’engagement est difficile, c’est bien celui de l’art, pensé, représenté, exposé, transmis par des hommes, pour des hommes.
Laure Adler explore dans ce livre les archétypes et les codes de l’Histoire de l’art, le lent basculement des femmes vers l’autonomie artistique et la reconnaissance du travail de création. Elle l’illustre magnifiquement à travers une cinquantaine de portraits.
On y découvre ainsi l’existence d’Artémisia Gentileschi (1593-1652). « Elle a pris le pouvoir dans la peinture, par ses thèmes, ses couleurs ainsi que par ses visions de la mythologie et elle a offert une réinterprétation radicale de la féminité… » Il a fallu attendre le début du 20e siècle pour voir renaître l’admiration et le respect envers cette artiste considérée comme la première grande peintre de l’Histoire. Dans un milieu très masculin « combien sont-elles encore à être dans l’obscurité des remises et des greniers ? » s’interroge Laure Adler.
3. Ce que j'ai appris à faire
Ces livres ont conforté mon idée d’accompagner l’entrepreneuriat féminin car il représente un facteur d’émancipation pour les femmes : c’est une aventure professionnelle et humaine qui développe le leadership. C’est aussi un moyen de transformer la société à travers le produit ou le service développé par l’entreprise. On pourrait écrire dans la même collection « les femmes qui entreprennent sont dangereuses » !
Avec notre fonds Orbital, nous sommes devenus un acteur au sein de l’écosystème entrepreneurial pour répondre aux problématiques spécifiques rencontrées par les femmes : les aider à travailler leur confiance en soi pour se lancer et mener à bien leurs projets, vaincre le syndrome de l’imposteur, trouver les financements, enfin les mettre en réseaux et utiliser la force du collectif pour faire réussir leurs projets.
4. Mes citations-mantras
« Ne dites jamais c’est normal, réveillez-vous chaque jour en vous disant que vous devez défendre votre liberté ».
Le message de Marjane Satrapi cité dans « Les femmes qui pensent sont dangereuses » s’adresse à tous. Elle préfère se demander ce qu’est un être humain libre, homme ou femme, ce qu’est réfléchir par soi-même sans se conformer à la pensée commune.
« Un enfant, un professeur, un crayon, un livre peuvent changer le monde »
L’affirmation de la Pakistanaise Malala Yousafzai, rappelée dans « Les femmes qui s’engagent sont dangereuses », résume bien le combat pour l’éducation des filles mené par cette jeune militante, prix Nobel de la Paix en 2014, qui a failli payer de sa vie son désir d’étudier.
5. Ce que ça a changé dans ma vie
Depuis la création de notre Fonds de dotation, nous rencontrons beaucoup de femmes. Nous arrivons à la même conclusion qu’Hillary Clinton : « Les femmes sont le plus grand réservoir inexploité de talents au monde », en particulier sur les continents africain et sud-américain.
Notre Fonds de dotation a donc décidé de mettre à la Une de son site internet des portraits de femmes, « rôle modèles » qui ont le pouvoir d’inspirer, de donner confiance, d’encourager à mobiliser son énergie pour réaliser son projet ! Ces portraits donnent envie d’agir, de s’engager. Des femmes de toutes conditions et de toutes nationalités présentent leurs projets, expriment avec simplicité leurs difficultés et la manière dont elles ont réussi. Des femmes accessibles, avec qui on peut interagir. Notre ambition est de rendre possibles l’émergence et la visibilité d’un grand nombre de femmes inspirantes, singulières et plurielles.
A la manière de la collection « les femmes qui… », mettant en lumière des pionnières, nous cherchons à valoriser celles qui feront le monde de demain. Notre micro-révolution à nous.
Illustration : un grand merci à Louise de Lavilletlesnuages