L'argent, pour vous, c'est...
Catherine Barba : C’est une liberté ! Je viens d’un milieu très modeste et j’ai grandi avec l’idée qu’on pouvait s’élever par l’école. Je suis en quelque sorte un pur produit de la méritocratie. On m’a appris à être un bon petit cheval de course, à travailler dur et à viser le succès. Pour moi, le prix ultime ce n’était pas l’argent ou le prestige, mais la liberté de choisir un métier que j’aime et qui me passionne.
Est-ce qu’on parlait d’argent dans votre famille ?
Catherine Barba : A la maison, on faisait très attention à l’argent, c’était quelque chose de précieux. On faisait les comptes toutes les semaines, dans des livres dédiés. Comme l’argent était durement gagné, on n’allait pas le dilapider. Si on en gagnait un peu, on n’en parlait pas. Quand on allait au restaurant ou en vacances, on en profitait encore plus parce qu’on savait le temps qu’on avait mis à le gagner. Je suis fière de venir de ce milieu-là. Je n’ai pas hérité de grand-chose, mais j’ai hérité du goût de l’effort. Si mes grands-mères pouvaient voir mon appartement aujourd’hui, elles me vouvoieraient (rires) !
Vous souvenez-vous de votre premier salaire ?
Catherine Barba : Oui, c’était à New-York ! A l’époque, je ne savais pas encore qu’on pouvait créer sa boîte. J’avais accepté un stage à mourir d’ennui dans une banque de Goldman Sachs. Le point positif, c’est que j’étais grassement payée. Pour la première fois de ma vie, je pouvais faire des folies. D’ailleurs, je n’ai rien économisé. J’ai ramené des cadeaux à tout le monde. Je savais qu’en sortant d’une école de commerce comme l’ESCP, j’allais gagner de l’argent, j’avais confiance. Au départ, quand j’ai été acceptée en école de commerce, j’avais l’impression d’avoir raté ma vie. J’avais fait une prépa littéraire pour intégrer l’Ecole Normale Supérieure (ENS). En vain. Mais je me suis vite rendu compte que je gagnais huit fois plus que mes anciens camarades de promotion. Je n’en tirais aucune fierté, je faisais ce pour quoi j’avais été programmée.
L'argent fait-il partie de votre ambition professionnelle ?
Catherine Barba : Au début de ma carrière, j’avais envie de gagner de l’argent. C’était ma source de motivation. En passant devant les beaux immeubles du septième arrondissement à Paris, je jetais un œil à l’intérieur pour admirer les meubles et la décoration. Je n’étais pas envieuse, mais ça me faisait rêver. Depuis toute petite, j’ai toujours rêvé d’avoir un appartement près de la Tour Eiffel. Maintenant que j’ai pu me l’offrir, je rêve d’autre chose. Mon mari m’a demandé si je voulais un sac Hermès en croco pour mon anniversaire, je lui ai répondu non. A 50 ans, je suis à un tournant de ma vie. J’ai soif d’expériences et de défis, pas de choses matérielles. Je rêve de faire le GR20 cet été, ou de voir mon entreprise réussir.
Parlez-vous d’argent avec vos proches ? A qui osez-vous dire votre salaire ?
Catherine Barba : Je n’ai aucun tabou en ce qui concerne l’argent. Si quelqu’un me demande mon salaire, je préfère donner le chiffre d’affaires annuel de mon entreprise qui est de 500 000 euros. Comme je me rémunère en dividendes, cela a plus de sens. De nos jours, parler de salaire ne suffit pas, il faut également prendre en compte les revenus du capital.
Comment gérez-vous l’argent au sein de votre couple ?
Catherine Barba : Lorsque j’ai rencontré mon mari, il était Agrégé de philosophie. Il travaillait dans une maison de disques. On était ce qu’on appelle « un couple inversé » : je gagnais beaucoup plus que lui. Pour être honnête, il ne l’a pas très bien vécu. Pour m’épater, il a décidé de créer sa propre entreprise, spécialisée dans l’accompagnement des artistes et des labels. Ça a été un succès fulgurant, c’est même devenu une licorne ! Il plaisante souvent en disant qu’il l’a fait pour m’empêcher de m’enfuir avec un millionnaire du web. Aujourd’hui, il a revendu ses parts et nous avons un compte joint ainsi que des comptes individuels.
Vous êtes-vous déjà battue pour une meilleure rémunération ? Racontez-nous.
Catherine Barba : J’ai le luxe de ne plus avoir à me battre pour une meilleure rémunération. Mais j’ai créé ma nouvelle entreprise, Envi, une école dédiée aux indépendants, pour aider les autres à obtenir une meilleure rémunération ! Le salariat est un modèle qui correspond à une phase économique révolue : on acceptait une certaine aliénation, en échange de la sécurité de l’emploi. Aujourd’hui, les gens aspirent à vivre autrement et veulent se mettre à leur compte. Ils veulent vivre de leur expertise sans pour autant devenir des start-upers. Je veux aider ces personnes, en particulier les femmes, à trouver un modèle d’entreprise économiquement viable. C’est la raison pour laquelle je me lève tous les matins.
Comment aidez-vous ces femmes, concrètement ?
Catherine Barba : Nous étudions ensemble leur modèle d’entreprise. Nous examinons leur offre, analysons le marché, les besoins et les clients, en cherchant à comprendre ce qui les rend uniques et ce qui les distingue. Nous nous concentrons particulièrement sur la façon de générer des revenus à partir de leur activité. Il n’y a pas de secret, pour réussir, il faut savoir vendre. Ce n’est pas toujours facile, mais cela s’apprend. Il faut faire preuve de beaucoup de persévérance et de rigueur pour « faire » de l’argent.
Quel conseil aimeriez-vous donner ?
Catherine Barba : Le meilleur conseil que je puisse donner est de ne jamais dépendre d’une tierce personne. C’est le conseil que je donne à ma fille, qui a 20 ans. J’ai vu des femmes être quittées et se retrouver sans ressources financières. Il ne faut jamais transiger sur sa liberté et son indépendance financière.
Illustration : un grand merci à Marie Lemaistre et l’agence Fllow