En 2015, un groupe de chercheurs anglais de l’Université d’Exeter a mis en évidence le rôle crucial des femelles orques dans leurs communautés. Elles endossent très souvent la fonction de matriarche au moment de la ménopause, se plaçant à la tête du groupe pour diriger les déplacements collectifs, en particulier lorsque la nourriture se fait rare. Les femelles ménopausées deviennent ainsi des meneuses, dépositaires de connaissances écologiques, nécessaires pour la survie de leur clan. Je ne sais pas vous, mais moi, je regarderai les orques différemment à l’avenir !
“ Changer le monde commence souvent en faisant évoluer son monde et prenant du pouvoir sur soi "
Et si nous aussi, on gagnait en pouvoir sur nous-mêmes avec l’âge ? Si l’on pouvait encore être pleinement puissante, transmettre, accompagner, s’épanouir, et devenir des leadeuses sans être mises de côté sous prétexte d’âgisme – et de sexisme ? Évidemment que oui ! Dans son essai Qui a peur des vieilles ?, Marie Charrel, journaliste économique au Monde et romancière, explique comment certaines wise women arrivent au premier plan en politique, en économie, dans la culture, etc. La ménopause n’est pas la fin, mais la continuité voire le début d’autres cycles !
« Depuis quelques années, des figures fortes de femmes d’expérience s’imposent à de hauts postes et ont acquis une influence majeure au sein de la sphère politico-économique mondiale. » Marie Charrel évoque ainsi Anne-Marie Slaughter, dirigeante du think tank américain New America, qui se félicite de voir des femmes ménopausées « essayer de changer le monde ». Citons par exemple Christine Lagarde, à la tête de la BCE depuis 2019, Kamala Harris, actuellement vice-présidente des États-Unis depuis 2021 ou bien Ursula von der Leyen, présidente de la commission européenne depuis 2019.
Changer le monde pourrait spontanément paraître comme une ambition insurmontable pour tout un chacun. Or, cela commence souvent en faisant évoluer son monde et en prenant du pouvoir sur soi. Cette envie peut s’incarner dans le quotidien de chacune d’entre nous en étant pleinement des meneuses de nos vies, sans entrer dans la performance ou dans l’injonction paradoxale qui dirait : « Aimez-vous telle que vous êtes, mais soyez parfaite ! »
“ Passé 50 ans, la connaissance de soi est plus affinée et permet aux femmes de se sentir plus libérées ”
Dans son essai, Marie Charrel explique que passé 50 ans, la connaissance de soi est plus affinée et permet aux femmes de se sentir plus libérées, pour créer une voie entre la puissance et l’apaisement menant à l’empowerment : « Avec l’âge, on se sent plus libre en pensée, moins sujettes aux pressions. Les femmes de plus de 50 ans capitalisent sur la connaissance d’elles-mêmes, de leur corps, qu’on aime plus ou moins, de ce qu’on se sait capable de faire. L’âge et la connaissance de soi, cela permet de faire sa cuisine à soi, ce que l’on prend, ce que l’on laisse. On se recrée une liberté à soi. Il n’y a rien d’automatique, et il y a des possibilités et du potentiel à explorer. »
C’est d’ailleurs ce que confirme l’enquête de Kantar pour DisonsDemain : plus de 80% des femmes célibataires de plus de 50 ans se sentent plus indépendantes, plus libres dans leurs choix, et savent mieux ce qu’elles veulent dans la vie. De plus, 67% ont plus de confiance en elles.
“ Inspirantes et leadeuses, les femmes de plus de 50 ans le sont tout autant que les femelles orques ”
Concrètement, on peut commencer par faire un pas de côté en regardant nos désirs, nos vulnérabilités, nos activités régulières pour ensuite choisir les espaces que l’on a envie de re-découvrir et explorer pleinement son potentiel. On pourra ainsi décider de faire évoluer son style vestimentaire, refaire pousser ses cheveux, faire apparaître ses cheveux blancs, se lancer dans une passion que l’on n’a jamais explorée, s’inscrire sur un site de rencontre (2 millions de célibataires se sont inscrits sur DisonsDemain), ou encore se former pour se lancer dans une nouvelle voie professionnelle.
Mieux se connaître, dépasser ses croyances limitantes, déconstruire les injonctions, développer son potentiel, cela peut aussi se faire dans le partage et l’échange avec ses pairs, des femmes d’autres générations, et aussi des hommes. A ce propos, la créatrice de mode Fanny Karst, qui conçoit des vêtements pour les old ladies, se sent inspirée par « les femmes de plus de 70 ans et leur liberté. [Elle veut créer] des vêtements si élégants que toutes les générations voudraient les porter ».1
Inspirantes et leadeuses, les femmes de plus de 50 ans le sont tout autant que les femelles orques, et nous montrent qu’il n’y a pas d’âge pour l’empowerment. Quel que soit le moment de vie dans lequel on se situe, on pourrait se demander quelles femmes nous inspirent pour avoir des modèles afin d’explorer nos différents potentiels.
Illustration : un grand merci à Laurence Bentz et l’agence Virginie
1Citation de Fanny Karst, tirée du livre de Marie Charrel.